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Livre - Page 7

  • Deux cons (tiers inclus)

    Certains dialogues de Platon, c'est connu, sont de véritables pièces de théâtre. Dans les plus courts, je tiens Ion et Eutyphron pour deux des plus drôles. Ce n'est pas seulement parce que ces deux baudruches, le rhapsode et le prêtre, se font copieusement massacrer par Socrate. Non, c'est surtout parce qu'ils sont tous deux cons, mais alors merveilleusement cons. Ce sont des cons mieux qu'on en rêve. Ils sont encore mieux que ceux qui passent à la télé tous les jours. Ils seraient indifféremment ou presque acteur et journaliste, ou humoriste et philosophe. Quand j'avais lu Ion, il y a quelques années, j'avais eu l'idée d'en faire une adaptation libre ; je m'en étais ouvert à un collègue, qui peu après a eu exactement la même idée et l'a réalisée. Une idée semblable m'est venue à la relecture, récemment, d'Eutyphron. Mais ce dont j'aurais le plus envie, ce n'est pas d'adapter l'un ou l'autre des deux petits livres de Platon, mais de faire se rencontrer ces deux personnages-là, véritables Bouvard et Pécuchet de la Grèce Antique. Le titre pourrait être tout simplement :
    Deux cons.
    Avec un point à la fin, contre l'usage typographique.


    26 février 2025

  • Koyré

    J'ai fermé le livre en disant à voix haute : merci, monsieur. C'était les trois Entretiens sur Descartes d'Alexandre Koyré. Une telle intelligence, une telle clarté ne se retrouvent pas fréquemment. Surtout chez les philosophes ou prétendus tels (la dernière rinçure d'Université se complaisant au titre). La dette que nous avons tous envers Descartes, et qui n'est pas celle du tout, je crois, qu'on s'imagine, est très clairement exposée ; non moins que le fait qu'elle n'a pas fini du tout de courir, et que Descartes permet en effet, et beaucoup mieux que l'œuvre à la fin confuse du moustachu de Sils-Maria, de détruire les idoles, toutes. Ce qui est assez dangereux. Ces trois Entretiens forment la fin d'un livre consacré à l'Introduction à la lecture de Platon (que j'ai lu ensuite, procédant à rebours). Les deux opus se complètent et dialoguent. Ils remettent silencieusement de l'ordre. 

    5 février 2025

  • Le Carré contre le Carré

    A Pierre Paté (en souvenir d'une conversation)***

    Il m'a toujours semblé qu'il y avait deux périodes (au moins) dans la production romanesque de John le Carré. 
    Une période de la Guerre froide où le monde est complexe, la morale ambivalente, la langue riche (la période qui culmine avec la trilogie de Karla : La Taupe, Comme un collégien, Les gens de Smiley) à laquelle a succédé, après la Guerre froide aussi, une période en quelque sorte où le Carré se doit à son public (succès oblige, au moins depuis, disons, la Constance du jardinier) et raconte un monde apparemment aussi complexe, mais avec une morale plus évidente (et un peu plus démagogique), et une langue simplifiée, lisible donc par les générations moins cultivées.  Le Carré a quelque peu perdu à gagner tant. Il est tout de même resté intéressant, mais par comparaison.

    (Le portrait que fait de lui Salman Rushdie dans sa magnifique autobiographie Joseph Anton peut être compris comme allant dans ce sens également. Le Carré attaque et critique les puissants qu'il est convenu de pouvoir attaquer et critiquer, mais se couche mollement devant ceux qui ne se laissent pas critiquer sans recourir en retour à la plus grande violence (les islamistes, par exemple).)

    20 juillet 2024

    *** Ajout du 30 septembre 2024



  • Tout le mal

    Je ne pensais pas relire ce livre, je voulais juste y jeter un œil, mais le livre m'a happé. C'est le genre de livre dont j'aimerais retenir tout (et je suis très loin de pouvoir ça, évidemment, saisir un livre comme un aigle sa proie, dans l'ensemble et dans les détails, dans l'explicite et dans l'implicite). Une amie m'a demandé ce que je lisais, et je lui ai répondu que je lisais ce livre pour la quatrième fois parce que, ai-je dit sans préméditation, il y a tout. Oh, ça a l'air idiot, comme ça, je sais. Or non, il n'y a pas tout ; mais il y a, pour ainsi dire, et je sais déjà que les chipoteurs chipoteront, tout le mal ; et le bien même est en creux indiqué, hélas inaccessible. Je ne sais pas ce que Conrad a vu et dont il nous préserve encore, nous donnant l'idée des voix dans les ténèbres, mais non encore ce que disent ces voix (que l'on devine, entrant ainsi dans la confidence abjecte). Aucun livre, ou très peu, décidément, ne porte son titre aussi bien que ce Cœur des ténèbres. Même l'amour est considérablement pourri, horriblement pourri, pour être plus précis (les lecteurs du livre comprendront). L'amour ou ce qui passe pour lui ; ce qui enverrait le véritable, sans doute aussi qui est la vérité, très loin là-haut, dans le ciel même, dans l'au-delà, s'ils existent.

    5 février 2025

  • Maxime 127

    Je prends le vieux Folio de La Rochefoucauld et (re)commence à lire ses Maximes dans l'ordre.

    Je constate que je n'ai rien souligné ni noté dans ce livre que j'ai lu plusieurs fois.

    Tout à coup, je découvre le nombre 127 entouré au crayon.

    127

    Le vrai moyen d'être trompé, c'est de se croire plus fin que les autres.

    En effet. C'est tout moi.

    Je m'étais bien reconnu, alors. 

    Le nombre 149 aussi est entouré (je m'en avise à l'instant) :

    Le refus des louanges est un désir d'être loué deux fois.

    Très bien, d'accord, je refuse les louanges.

    30 janvier 2025