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poésie

  • Mallarmé, Meillassoux, etc.

    C'est amusant, de reprendre, des années après, les volumes anciens de Mallarmé.
    Je comprends alors que je ne savais pas à quel point il avait participé de la façon dont j'envisage le théâtre (finalement, avant l'immense Copeau, il y a Mallarmé) ; pire encore, la façon dont j'envisage sinon le poème, du moins le vers. 

    Dans la foulée, d'ailleurs, j'ai relu le livre du philosophe Meillassoux, Le Nombre et la Sirène. Ce qui m'a fait lire ensuite le très radical Après la finitude ; livre qui par ailleurs venait de m'être recommandé sur l'excellente page, de plus en plus politique, de Joan Larroumec.

    « Il importe pour la suite d'avoir à l'esprit cette ambition extraordinaire de Mallarmé — refonder un culte civique suppléant à un christianisme déficient — bien loin de l'image convenue du « poète aux bibelots » et aux intérieurs raffinés.  » Meillassoux, à propos de Mallarmé.

    « On a touché au vers » note, pour une fois très simplement Mallarmé, qui est bien le premier à comprendre l'ampleur de la révolution du vers dit libre non moins que ses formidables dégâts potentiels. Et par vers, sans doute faut-il encore entendre, le distique (c'est-à-dire qu'on a touché non seulement au mètre, mais à la rime.)

    Tout cela est très mal tombé, décidément, a interrompu ou suspendu les travaux en cours, de trop s'en approcher.

     

    10 mars 2025

     

    (Meillassoux insiste sur la particularité française du double vers, du distique ; il faudrait même parler du double distique, et de l'alternance des rimes masculines et féminines.)

     

  • Un peu d'espoir

    J'ai souvent eu envie de poser cette question à des gens qui écrivent de la « poésie » : Qu'est-ce qui, dans ce que vous écrivez, vous permet de dire que c'est de la poésie ?

    Je crois que très / souvent la réponse serait / qu'on revient à la / ligne quand on veut / (s'il existe des po / étonètes). Les poétenproses écrivent quant à eux des textes courts, pas très réalistes et dans lesquels l'auteur fait montre de sa pensée et de ce qu'il aurait pu, s'il avait voulu et suivi quelques fastidieuses années d'étude, enseigner la philosophie au lycée public de Saint-Cucufin.

    Il est évident que ce n'est pas suffisant, et que la plupart du temps ce qui fait que les gens disent qu'ils écrivent de la poésie est une croyance, la croyance qu'ils écrivent de la poésie. On n'aurait pas le cœur de leur ôter leur croyance, qui doit bien servir à leur psychique équilibre. Il y a déjà beaucoup trop de gens sous anti-dépresseurs dans ce pays (et cela même alors que presque personne, Dieu merci, ne lit les productions des poètes.)

    Une question comparable peut être posée à des romanciers. Pour les dramaturges, ou produits dérivés, en tant qu'ils ne prétendent plus écrire une vieillerie comme du théâtre, la question ne se pose plus vraiment. Ces gens admettent ne pas faire ce qu'ils disent faire, et l'honnêteté a moins de rang là que la simple bêtise.

    Il faut bien admettre que toutes les définitions jamais données ne sont pas satisfaisantes ; et c'est pour cela que ma question était d'abord personnelle. L'idéal serait que chaque poète ait (au moins) une réponse technique. Mais j'en doute. Il y a chez le poète un sentiment de poésie comme selon l'Education Nationale il y a un sentiment de passé simple chez qui écrit : il prena ses jambes à son cou et courit à perdre la laine. Cette comparaison me paraît assez juste hélas.

    Les romanciers contemporains, eux, ont arrêté d'avoir tout rapport (narratif ou stylistique) avec leurs prédécesseurs. Ils racontent leur vie en espérant qu'elle pourra émouvoir des gens qui ont la même, ce qui n'arrivera pas. Les plus cyniques parmi eux, qui font de l'argent, ne sont jamais que de féroces naïfs qui se trouvent intelligents. Quand par extraordinaire ils ont de la littérature une idée précise, comme Patrice Jean, elle a deux siècles, est capable de comprendre quelques romanciers du XXème siècle, ressemble à ce qu'on enseignait dans les années 1980. Candy au Kafka-shop eût été un meilleur titre.

    Ce qui saute à la gueule, c'est que personne ne comprend rien au monde qui arrive et préfère parler d'autre chose en regardant le ciel, ses pieds, son sexe.

    Tous ces gens, dont je suis d'évidence, écrivent de toute façon pour personne, puisque personne ne lit rien ; et qu'il suffit de fréquenter quelques lycéens pour constater l'effondrement général du QI de la jeunesse. Une nation d'abrutis est en cours de fabrication ; et par bonheur, elle va s'éteindre.

    30 janvier 2025

     

     

  • Je déteste les cons...

    Je me souviens avoir vexé bien involontairement un poète (mort depuis) en publiant en guise de « bio » sur ma page FB cette phrase (qui est très accessoirement un alexandrin) :
    « Je déteste les cons qui racontent leur vie. »
    Comprenant que c'est le fait de raconter sa vie qui défin
    it le con (ce qui est à tout le moins discutable, mais au moins très égalitaire), il avait décidé de se vexer, et me l'avait fait savoir (sinon je ne l'eusse point su).
    (On notera que sa mauvaise compréhension de mon mauvais vers le rend performatif. Comprenant que le fait de raconter sa vie est preuve de connerie, et par ailleurs ayant raconté sa vie, il se fit sitôt con, prouvant involontairement que j'avais bien raison (quoi que cela veuille dire). Merci.)
    Comme sa vexation tonitruante et tout à fait mal aimable me semblait davantage une preuve de connerie que le simple fait de raconter sa vie (je vous raconte la mienne, là, notez le), je lui avais répondu d'une de ces répliques que Molière a puisé dans l'ancien peuple de France :
    « Qui se sent morveux, qu'il se mouche. »
    J'aime ramener le calme. (Hum.)
    L'ayant trouvé un peu con et tout à fait dénué d'humour, je n'ai jamais lu la poésie de ce monsieur, qui sans doute aucun racontait sa vie. Bref, il ne suffit pas de raconter sa vulgaire vie pour aussitôt devenir Chateaubriand, Saint-Simon, Proust.

     

    6 janvier 2025

  • La poésie hautement éducatrice (1905)

    J'ai déniché pour cinquante centimes un livre de choix de poésies italiennes (sobrement intitulé Poesie Scelte) destiné aux classes de la sixième à la première, édité au début du XXème siècle chez Vuibert. Passé la préface, tout est en italien, même les notes de renvoi. 

    L'auteur de la sélection (J. Marchioni) en sa préface cite Le Rapport de la Commission des épreuves de Langues vivantes au Brevet supérieur (1905) :
    « La poésie, mieux que la prose, permet, sous une forme condensée, de saisir la manière de penser, d'agir et de sentir propre à un peuple, de pénétrer, pour ainsi dire, jusque dans son âme souvent fort différente de la nôtre ; ainsi envisagée, l'étude de quelques poésies étrangères, si ces poésies sont caractéristiques, peut devenir hautement éducatrice. »

    Dieu merci, tout a depuis été uniformisé dans les peuples et jusqu'aux identiques mois des poètes.

     

    6 janvier 2025

     

  • À hauteur

    Plus votre idée de quelque chose est haute, plus est grand le nombre des gens vous paraissant dans l'exercice médiocres et nuls. (Un tel axiome ne tient pas compte, évidemment, des amitiés réelles, qui poussent au silence ou à l'indulgence plus ou moins coupables, ni des inévitables mondanités, hypocrisies, arrivismes divers.) Ceux en revanche qui, malgré qu'ils en aient, ont une idée médiocre de la chose en question, peuvent entamer tranquillement une carrière sur la foi de la reconnaissance de leurs pairs, puisqu'ils trouvent agréable d'en avoir ; ainsi que sur les œuvres et manœuvres des trafics d'influence (puisque c'est dans la mafia du milieu que tout se joue, des coudes ou des couilles). Pour l'homme de l'idée haute, hors des moments nécessaires d'exaltation solitaire, un certain réalisme consenti doit fréquemment le faire douter de se trouver à hauteur ; non moins qu'il lui fera mépriser, et dans le meilleur des cas ignorer, ces médiocres de la carrière ; ce qui pourra même, dans certains cas, le faire se trouver nul.

    (Note préparatoire à un papier pour une revue de poésie)