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Ciels de synthèse - Page 4

  • La poésie hautement éducatrice (1905)

    J'ai déniché pour cinquante centimes un livre de choix de poésies italiennes (sobrement intitulé Poesie Scelte) destiné aux classes de la sixième à la première, édité au début du XXème siècle chez Vuibert. Passé la préface, tout est en italien, même les notes de renvoi. 

    L'auteur de la sélection (J. Marchioni) en sa préface cite Le Rapport de la Commission des épreuves de Langues vivantes au Brevet supérieur (1905) :
    « La poésie, mieux que la prose, permet, sous une forme condensée, de saisir la manière de penser, d'agir et de sentir propre à un peuple, de pénétrer, pour ainsi dire, jusque dans son âme souvent fort différente de la nôtre ; ainsi envisagée, l'étude de quelques poésies étrangères, si ces poésies sont caractéristiques, peut devenir hautement éducatrice. »

    Dieu merci, tout a depuis été uniformisé dans les peuples et jusqu'aux identiques mois des poètes.

     

    6 janvier 2025

     

  • Echouer, oui, mais dans tout, et surtout dans l'échec

    Rien n'est aussi convenu aujourd'hui que d'écrire un roman. Et c'est très bien. Autant savoir dans quelles catégories désormais s'accumulent les choses convenues, sans importance. Entre le roman et vers libre à la  va-comme-je-te-pousse, on connaît l'adresse de la décharge publique. Une page de prose est déjà plus compliquée à réussir. Un dialogue, n'en parlons pas. L'écriture dramatique cherche désespérément à déboucher sur la scène et : ou elle est adaptée à la bêtise scénique contemporaine et, bête elle-même, y peut réussir ; ou elle n'y est pas adaptée et ou échoue à y parvenir ou s'y échoue. Quant à l'essai, il pue la mode, qu'il l'épouse ou la critique. On me dira qu'il y a des exceptions (il y a des tribunaux pour ça). Peut-être. Mais s'il y en a, il y en aura de moins en moins. Il y a déjà longtemps qu'il n'y en a presque plus. On me dira qu'elles n'en seront que plus exceptionnelles. Certes. (J'espère bien.) Et la plupart n'iront pas jouer dans les réseaux ordinaires de la soumission éditoriale à la médiocrité. Je ne comprends pas ce qu'un homme même un tout petit peu intelligent irait faire dans la politique française actuelle (et là, je ne trouve pas d'exception) ou dans le milieu de l'édition. Je trouve dans la mauvaiseté de la littérature française d'aujourd'hui d'excellentes raisons de me mettre sinon aux mathématiques, du moins à la logique élémentaire. 
    (J'espère bien. (J'ai dit.))

     

    17 décembre 2024

     

     

    Lien permanent Catégories : Journal
  • Ethique journalistique

    Ayant lu une critique honnête du Stella Maris de McCarthy sur le site de New York Times, j'arrive d'un clic sur la page de l'auteur de l'article, un dénommé Dwight Garner ; en bas de sa biographie, on peut lire le paragraphe suivant, intitulé Journalistic Ethics, dont le contenu semble absolument impossible dans notre cher pays.

    "Book critics abide by the same exacting ethical standards as other Times journalists. (Those guidelines are public; you can read about them here.) For me, among other things, this means not sitting on prize committees, advising publishers or providing advance blurbs for books. I don’t review books by people I know. If I have had even a glancing acquaintance with someone whose book I might want to review, I discuss the details with my editors. I rarely go to book parties or other industry events."


    (« Les critiques de livres sont soumis aux mêmes normes éthiques rigoureuses que les autres journalistes du Times. (En ce qui me concerne, cela signifie, entre autres, que je ne participe pas à des comités d'attribution de prix, que je ne conseille pas les éditeurs et que je ne donne pas de commentaires à l'avance sur les livres. Je ne fais pas la critique de livres écrits par des personnes que je connais. Si j'ai rencontré, ne serait-ce que de loin, une personne dont je pourrais critiquer le livre, j'en discute avec mes rédacteurs en chef. J'assiste rarement à des fêtes du livre ou à d'autres événements du secteur ».)

    Si tous les journaux et magazines français appliquaient soudain cette règle, il faudrait idéalement virer et remplacer tous les critiques littéraires, mais au niveau de corruption banalisée où nous flottons avec le sentiment du devoir accompli, il y a fort à parier que pour rester en place, lesdits critiques s'engageraient à changer du jour au lendemain, et radicalement, leurs goûts. J'imagine la tête de Frédéric Beigbeder, par exemple.
    Ah, ces foutus puritains d'Amerloques. 

     

    16 décembre 2024

     

  • Les caves du Vatican

    J'ai beaucoup ri en lisant Les Caves du Vatican. (Je ne m'y attendais pas, étant demeuré jusque là, quant à Gide, fidèle au pénible souvenir de la lecture en troisième de La Symphonie pastorale.)

    Cette drôlerie me paraît avoir deux causes : le style assez libre, cocasse et recherché ; le comportement absurde, car soumis à des règles logiques, des personnages. (Il se peut que le premier élément, d'ailleurs, cherche à masquer, partiellement au moins, le second.)

    Je crois que si Gide eût été anglais, sa « sotie » aurait été adaptée à l'écran (plusieurs fois, dont au moins une avec succès).

     

    9 décembre 2024

     

    Lien permanent Catégories : Livre
  • Le maillon manquant

    Deux faits.

    1. J'ai fait un petit billet ici, il y a quelque temps, sur l'emploi chez Descartes, dans le Discours de la méthode, à propos du suspens ou de la réduction, du verbe feindre.

    2. J'aime citer depuis longtemps le mot de Basil Bunting cité par Ezra Pound dans son ABC de la lecture :
    Dichten = condensare.

     

    Je n'aurais jamais pensé à lier entre eux ces deux faits sans le magnifique Livre des amis d'Hugo von Hofmannsthal (publié aux éditions de la Coopérative par Jean-Yves Masson, éditeur et traducteur) :

    Ecrire (dichten) = feindre* = to feign

    Jean-Yves Masson ajoute en note : « Hofmannsthal pense ici à l'étymologie des verbes français et anglais "feindre" et "to feign", dérivés du latin "fingere" qui signifie originellement "modeler, façonner", puis "imaginer", d'où provient aussi le mot "fiction". Le verbe "dichten" s'applique à la création littéraire en général, même s'il s'applique surtout à la poésie ("der Dichter peut désigner "l'écrivain").  »

    L'astérisque signifie que le verbe feindre est écrit en français par Hofmannsthal. Ce qui signifie donc, sauf erreur de ma part, que l'aphorisme d'Hofmannsthal est écrit en trois langues :

    Dichten = feindre = to feign 


    Je ne tire pas les conclusions.