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Le Guerrier appliqué, de Jean Paulhan

Le Guerrier appliqué est un grand petit livre.
D'abord publié en 1917, c'est un des livres trop rarement cités lorsqu'il est question de la première guerre mondiale. Chaque bref chapitre en deux ou trois parties est un poème en prose. La langue de Paulhan est d'un classicisme nerveux, rapide, presque tronqué.

Un exemple, pris dans la première page :
« Ces paysans me connaissaient depuis mes grands-parents : ils avaient de moi une opinion ancienne, et que je respectais. Puis, je les sentais supérieurs à moi par leurs habitudes et même par leurs plaisanteries. La conviction que j'étais bien plus instruit restait ici pure et faible : elle ne me servait de rien, et c'est par ma bonne volonté que je continuais à mériter leur estime. »
Cette langue est sans doute utile à comprendre le grand éditeur (cinquante ans à la nrf, pour aller vite) qu'aura été Paulhan.

La distance avec l'objet écrit est très grande ; l'image pourtant fulgure.
« Plus que tout le reste, une cave, éventrée avec son trottoir, me troubla. L'on voyait par la crevasse un buffet ciré, sous un hachis d'étoffe, de terre et de bois, et cette sécurité trompée. »

Le narrateur s'appelle Jacques Maast (un pseudonyme que l'auteur réemploiera) et il a dix-huit ans au début de la guerre ; Paulhan, lui, en a vingt-neuf et il a déjà été professeur à Madagascar. L'impression pourtant demeure nette que c'est l'auteur qui parle.
Pris dans le chapitre Comment est mort Glintz : « Le chagrin simple et sans retour que nous eût donné, dans la paix, la mort d'un ami, il est sûr qu'aucun de nous ne l'éprouva. Peut-être avions-nous ici l'impression d'entrer enfin dans la vraie guerre dangereuse, et contre nous-même le plaisir d'une attente satisfaite. Ou bien, par une réflexion plus personnelle, nous éprouvions vaguement qu'il y avait eu une chance de mort sortie, et qui n'avait pas été la nôtre. »


25 septembre 2025

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