Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Journal - Page 4

  • L'armée et le Hazard

    Hier. J'ai pour mission de convaincre le chef d'état-major des armées de faire pousser des poireaux sur tous les terrains militaires, les poireaux pouvant remplacer (secret défense) l'uranium dans la production d'énergie nucléaire. Toute la difficulté consiste à transformer le poireau238, qu'on trouve dans la nature, en poireau235.

    Ce matin. Je sèche sur une équation mathématique. Le général de Gaulle m'appelle pour me l'expliquer : son application physique permet de faire du café pour 66 millions de personnes ; sa résolution est : 1 cuiller pour 2,2 tasses, crise oblige.

    Les deux fois, je me réveille avec la chanson Ma poupée psychédélique de Thierry Hazard, avec ses paroles rigolotes qu'on n'oserait peut-être plus, Un soutien-gorge indestructible / Et un slip inviolable, dans la variété (qui ne varie plus). Rendez-nous Beethoven.

    26 octobre 2024

  • Incipit éjecté

    Les stries lumineuses au mur gris disaient que le jour s’ouvrait rose ; elle se leva nue, écarta les battants entrouverts de la fenêtre donnant sur la vallée probablement encore dans la brume, souleva le loquet grinçant et qu'il faudrait huiler tantôt, commença d’ouvrir les lourds volets de bois et la balle qui fit un petit cercle net à son front lui arracha la boîte crânienne.

    Lien permanent Catégories : Journal
  • Sur *Stella Maris* de Cormac McCarthy

    Je relis Stella Maris.

    Les deux ultimes romans de McCarthy ne se suivent pas mais se font face. C'est une sorte de dispositif.
    Je pense néanmoins qu'il est préférable de lire d'abord le roman de Bobby Western, Le Passager, relativement déroutant déjà, avant d'entrer dans celui d'Alicia Western, Stella Maris, qui est un roman si l'on veut (disons, un roman et quelque chose en plus. Ou autre chose qu'un roman. C'est surtout cela, je crois) parce qu'on y entrera muni déjà de nombre de clés biographiques et chronologiques.
    Le Passager est le roman du physicien défroqué Bobby, homme en fuite, errant parmi les lieux de sa vie dispersée ; Stella Maris, le livre de la mathématicienne défroquée, enfermée de son plein gré dans l'institution donnant son titre marial à l'ouvrage, consiste intégralement dans l'enregistrement (si j'ose dire) des neuf séances d'Alicia, avec le médecin psychiatre Michael Cohen, qui précédèrent son suicide.

    (On peut imaginer par exemple que Bobby Western est aussi intelligent que McCarthy, ce qui est déjà assez impressionnant. Mais Alicia, elle, est beaucoup plus intelligente que l'auteur, et que tout le monde (exceptons Grothendieck, Gödel, Oppenheimer, et Husserl et Platon, si vous voulez, toutes personnes, sauf le dernier, qui ne se sont pas exprimées par la fiction (au sens ordinaire)) ; et ce n'est pas rien de réussir un tel personnage, et de le rendre aussi émouvant. Il se peut ici que la structure dialogique du livre ait été d'un grand secours à l'auteur (mais je n'y reviendrai pas).

    Détour.
    J'aime citer souvent la belle phrase de Guy Debord en son Panégyrique : « Personne, mieux que Shakespeare, n'a su comment se passe la vie. » 
    (Souvent, j'ajoute que nous autres Français, nous avons bien sûr Molière et Balzac. De plus en plus, à force de le relire, je mettrais La Fontaine au-dessus du lot, dans le cadre d'une comparaison à Shakespeare, s'entend).
    Mais ce qu'il faut entendre, dans la phrase de Debord, c'est que ce dont il est question, c'est de savoir comment se passe la vie. Et cette question-là n'est pas seulement littéraire : elle ne concerne pas moins le philosophe, le physicien, le mathématicien, l'historien, l'anthropologue.


    Le seul moyen de considérer Stella Maris seulement comme un roman, c'est de ne pas le lire. Et ça, c'est à la portée de la plupart des gens qui lisent (pour ne rien dire des autres). Ce n'est pas du tout parce qu'il est constitué exclusivement des dialogues, par exemple, que ce n'est pas vraiment un roman (et ce n'est pas du tout non plus du théâtre, même si, comme je l'ai dit, The Sunset Limited conclut une chose et en ouvre une autre: celle-ci).
    Ce n'est pas du tout un événement littéraire hors norme, comme ont pu l'être les apparitions de Dostoïevski en Russie, ou de Proust en France ; c'est un évènement (quelques qualités littéraires qu'il ait par ailleurs) qui est avant tout scripturaire ; qui dépasse aussi complètement toute idée littéraire, ce qui le rapprocherait éventuellement du Proust lu par Marchaisse, à cette différence majeure énorme que McCarthy ne cache pas du tout ce qu'il fait. C'est étalé en plein jour. Et personne ne voit. Et c'est manifestement le pari que fait McCarthy. (Ils lisent ce qu'ils veulent lire ; ils vont donc lire ce qu'ils ont l'habitude de lire, même si certains trouveront l'ensemble un peu bizarre.) Fin de la littérature romanesque. (Tant pis pour ceux qui disent comme des robots que le roman peut tout ingérer, dépasser, etc.)

    Une autre conséquence de tout cela, c'est qu'il va falloir lire ou relire toute l'œuvre de McCarthy à l'aune de Stella Maris. Cormac McCarthy n'est donc pas seulement ce talentueux faiseur de westerns (tiens), ou de romans apocalyptiques (même si La Route est aussi un livre magnifique de la relation père-fils).

    Basta for today.

    29 octobre 2024

     

  • Ce que sont les occidentaux

    La cohérence est le moins pratiqué des fanatismes.

    Vieux logicien, nom que Verlaine (et Banville après lui) donne au diable. (Mais peut-être cette appellation est-elle bien antérieure à Verlaine...)

    Les occidentaux sont des pellicules de bouviers.
    Du moins si je traduis les mots westerns, films et cow-boys.

    5 novembre 2024

  • Personne ne lit rien

    J'ai l'habitude, mauvaise évidemment, de dire que personne ne lit rien.

    Il est déjà arrivé que des gens qui souhaitent me passer une commande d'écriture, refusent de lire ce que j'ai écrit précédemment.
    L'auteur dramatique est un prestataire de service ; il écrit ce qu'on lui demande ; il est prié d'épouser nos idées ; moins son style est personnel, mieux c'est. 

    Paulina Dalmayer partage sur sa page FB un morceau du billet que j'ai ici consacré à son dernier roman, Les Utopistes : elle ne craint pas de dire (le 26 octobre 2024) que je suis son dixième lecteur (le roman est sorti le 1er février 2023 chez Grasset). Son précédent roman, Les Héroïques, avait eu très bonne presse ; celui-ci n'en a pas : manifestement, il est trop gros.
    Trop de mots.

    Je n'ai pas encore lu Le Gardien du verger de Cormac McCarthy, qui est récemment sorti dans la nouvelle collection de poche des éditions de l'Olivier.  On peut lire dans la présentation qui y est faite de l'écrivain, que ses deux derniers romans, Le Passager et Stella Maris forment un diptyque unanimement salué en France. Je ne doute pas de ce que dit l'éditeur ; mais au vu de la complexité de ces deux romans, et particulièrement du second, je crois vraiment que les critiques qui ont salué (coucou) ces romans ne les ont pas lus. Ils sont partis du principe que McCarthy c'était bien ; que c'étaient sans doute (et ce fut le cas) ses deux derniers romans, et qu'il n'y avait qu'à, somme toute, crier au chef d'œuvre. Parfois, les non-lecteurs tombent juste.

    28 octobre 2024