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critique

  • Ethique journalistique

    Ayant lu une critique honnête du Stella Maris de McCarthy sur le site de New York Times, j'arrive d'un clic sur la page de l'auteur de l'article, un dénommé Dwight Garner ; en bas de sa biographie, on peut lire le paragraphe suivant, intitulé Journalistic Ethics, dont le contenu semble absolument impossible dans notre cher pays.

    "Book critics abide by the same exacting ethical standards as other Times journalists. (Those guidelines are public; you can read about them here.) For me, among other things, this means not sitting on prize committees, advising publishers or providing advance blurbs for books. I don’t review books by people I know. If I have had even a glancing acquaintance with someone whose book I might want to review, I discuss the details with my editors. I rarely go to book parties or other industry events."


    (« Les critiques de livres sont soumis aux mêmes normes éthiques rigoureuses que les autres journalistes du Times. (En ce qui me concerne, cela signifie, entre autres, que je ne participe pas à des comités d'attribution de prix, que je ne conseille pas les éditeurs et que je ne donne pas de commentaires à l'avance sur les livres. Je ne fais pas la critique de livres écrits par des personnes que je connais. Si j'ai rencontré, ne serait-ce que de loin, une personne dont je pourrais critiquer le livre, j'en discute avec mes rédacteurs en chef. J'assiste rarement à des fêtes du livre ou à d'autres événements du secteur ».)

    Si tous les journaux et magazines français appliquaient soudain cette règle, il faudrait idéalement virer et remplacer tous les critiques littéraires, mais au niveau de corruption banalisée où nous flottons avec le sentiment du devoir accompli, il y a fort à parier que pour rester en place, lesdits critiques s'engageraient à changer du jour au lendemain, et radicalement, leurs goûts. J'imagine la tête de Frédéric Beigbeder, par exemple.
    Ah, ces foutus puritains d'Amerloques. 

     

    16 décembre 2024

     

  • Sherlock Holmes, critique littéraire, esprit du dernier ordre

    Celui que je relis le plus, c'est La Fontaine. Ce mot d'esprits du dernier ordre s'applique à merveille aux critiques littéraires, par exemple.  On le trouve dans Le Serpent et la Lime, livre V, fable 16.

    On conte qu'un Serpent voisin d'un Horloger
    (C'était pour l'Horloger un mauvais voisinage),
    Entra dans sa boutique, et cherchant à manger,
                  N'y rencontra pour tout potage
    Qu'une Lime d'acier qu'il se mit à ronger.
    Cette Lime lui dit, sans se mettre en colère :
            Pauvre ignorant ! et que prétends-tu faire ?
                  Tu te prends à plus dur que toi.
                  Petit serpent à tête folle,
                  Plutôt que d'emporter de moi
                  Seulement le quart d'une obole, 
                  Tu te romprais toutes les dents :
                  Je ne crains que celles du temps.

    Ceci s'adresse à vous, esprits du dernier ordre,
    Qui n'étant bons à rien cherchez sur tout à mordre.
                Vous vous tourmentez vainement.
    Croyez-vous que vos dents impriment leurs outrages
                         Sur tant de beaux ouvrages ?
    Ils sont pour vous d'airain, d'acier, de diamant.

     

    Je lis Une étude en rouge, mon premier « Sherlock Holmes » depuis l'adolescence. Un passage me fait penser qu'un certain romantisme a voulu voir dans la littérature une manière de crime, de passage en tout cas des limites. Et je me dis que si Holmes, dans le passage qui suit, avait dit livres et auteurs en place de crimes et de criminels, et quelque nom de journal ou magazine en place de Scotland Yard, il se fût parfaitement défini comme esprit du dernier ordre. 

    «Il n'y a pas de crimes et il n'y a pas de criminels de nos jours, dit-il d'un ton de regret. A quoi cela sert-il d'avoir un cerveau dans notre profession ? Je sais bien que j'ai en moi ce qu'il faut pour que mon nom devienne célèbre. Il n'y a aucun homme, il n'y en a jamais eu qui ait apporté une telle somme d'étude et de talent naturel à la déduction du crime. Et quel en est le résultat ? Il n'y a pas de crimes à découvrir ; tout au plus quelque maladroite crapulerie ayant des motifs si transparents que même un agent de Scotland Yard y voit clair tout de suite. »

    On se demande surtout quelle trouille ou quelle lucidité peut bien retenir ce critique de passer à l'acte.