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russell

  • Wittgenstein, de Terry Eagleton et Derek Jarman

    Les éditions de l'Eclat ont publié en 2005 le scénario initial de Terry Eagleton ainsi que le découpage du film de Derek Jarman de 1993 fait à partir de ce scénario considérablement remanié.

    Le scénario d'Eagleton, de facture assez classique, commence en 1929 quand Keynes, Russell et Moore parviennent à faire revenir à Cambridge l'Autrichien de 40 ans. Le film de Jarman commence plus tôt, est beaucoup plus syncopé dans le découpage, est davantage onirique (c'est très visible dans les photogrammes dont le livre n'est pas avare) et met aux prises à plusieurs reprises Wittgenstein avec un Martien. Le film dans sa seconde partie recycle et distille (en changeant parfois les noms des protagonistes) un certain nombre de scènes présentes dans le scénario initial ; c'est à la lecture seule (je n'ai pas vu le film) parfois convaincant et parfois non.
    L'ensemble est intéressant et permet à qui veut de comprendre la personnalité exigeante, fantasque et morale à la fois d'un philosophe qui n'en est pas un, se méfie copieusement de la philosophie, et qui finalement est un aventurier, dans l'ordre de l'action comme dans l'ordre de l'esprit.

    J'attendais (je ne sais pourquoi) que le film mît en pratique théâtralisée un certain nombre de situations pensées par Wittgenstein (notamment dans les Recherches philosophiques) et de ce point de vue j'ai été globalement déçu (mais je ne l'ai été que parce que mon attente n'avait pas lieu d'être), même si les quelques moments où Wittgenstein est montré faisant cours (de façon non magistrale) sont intéressants (mais combien trop courts).

    Pour finir, les trois dernières répliques du scénario d'Eagleton :

    « WITTGENSTEIN : Tu sais, j'aimerais écrire une œuvre philosophique qui soit intégralement composée de blagues. (Pause.) Mais je doute d'être en mesure de le faire.
    KEYNES : Pourquoi ?
    WITTGENSTEIN : Je n'ai pas un grand sens de l'humour. »

    27 novembre 2025

    Wittgenstein, le film de Derek Jarman, le scénario de Terry Eagleton, traduit de l'anglais par Patricia Farazzi, éditions de l'Eclat, 2005

  • Le réseau des clochards du futur

    « — Combien êtes-vous en tout ?

    — Des milliers, sur les routes, les voies de chemin de fer, clochards au-dehors, bibliothèques vivantes au-dedans. Rien n'était prémédité au départ. Chacun avait un livre dont il voulait se souvenir et il y est parvenu. Puis, durant une période d'une vingtaine d'années, nous nous sommes rencontrés, en voyageant, nous avons tracé les mailles du filet et élaboré un plan. La notion la plus importante que nous avons dû nous ancrer dans la cervelle, c'est que nous étions des personnages sans importance, que nous ne devions jamais devenir pédants, nous croire supérieurs à qui que ce fût. Nous ne sommes rien de plus que des couvertures de livres poussiéreuses. Certains d'entre nous vivent dans de petites villes. Le chapitre I du Walden de Thoreau à Green River, le chapitre II à Willow Farm dans le Maine. Et même il existe une ville dans le Maryland, une ville de vingt-sept habitants, aucune bombe ne touchera cette ville où sont réunis les essais complets d'un nommé Bertrand Russell. On pourrait presque tourner les pages de cette ville, habitant par habitant. »

    Ray Bradbury, Fahrenheit 451, traduction d'Henri Robillot, Denoël, coll. Présence du futur